Historique
des fouilles archéologique d’Ammaedara.
Comme
nous l’avons vu précédemment le site d’Ammaedara
était connu depuis le XVIIIe siècle. Petit à petit le lieu révéla
une grande richesse, d’abord par l’importance épigraphique tant
qualitatif que quantitatif. Puis lorsque l’archéologie à la fin
du XIX devint une discipline de l’histoire indispensable pour la
connaissance du passé, plusieurs chercheurs s’intéressèrent aux
nombreux monuments du site, notamment aux églises qu’on a
retrouvé. En fait, les vestiges topographiques qui composent
Ammaedara,
retracent son histoire: au sud-est à environs un kilomètre
d’Ammaedara
sur le site du temple de Saturne on a retrouvé quelques traces
artefacts d’origine puniques; tout au tour du lieu, de vastes
nécropoles civiles entouraient Ammaedara,
vers l’est de la ville à partir de l’arc de Septime Sévère le
long de la voie Carthago-Theveste
en allant en direction de Carthage une importante nécropole
militaire révéla une forte quantité d’épitaphes de légionnaires
de la Troisième Légion Auguste.
A l’intérieur de la
cité on avait des monuments caractéristiques d'une ville romaine:
des thermes d’hiver, un théâtre, un forum et un capitole, l’arc
de commémoration de Septime Sévère à l’entrée de la cité, et
le fameux cardo maximus et decumanus maximus, typique d’une colonie
romaine du Haut-Empire romain .
Ammaedara c’est aussi la ville aux sept églises, la plus ancienne daterait de la seconde moitié du IIIe dont une chapelle rappelle la présence des Vandales, mais le vestige qui marqua l’esprit de tout temps, la vaste citadelle byzantine construite aux alentours de 540.
Des découvertes récentes révèlent aussi que le site fut, au cours de la période médiéval, occupé, et entre l’arc de Septime-Sévère et la citadelle nous avons des vestiges d’une mosquée peut-être ottomane. Paradoxalement des traces du camp de la Troisième Légion Auguste n’ont pas encore été découvertes. Aujourd’hui, les chercheurs actuels forment l’hypothèse que la citadelle byzantine s’est construite sur l’emplacement du camp1 et Les seuls preuves que nous possédons sont indirectes, elles proviennent principalement des stèles de soldats de la légion découverte dans le cimetière militaire à l’est de la ville.
La
période des recherches au cours du Vingtième siècle débute avec
André Piganiol (1883-1968) et Roger Laurent-Vibert (1884-1925).Les
deux chercheurs étaient membres de l’Ecole française de Rome, A.
Piganiol en fut membre de 1906 à 1909 et R. Laurent-Vibert de 1907 à
1909. Entre 1908 et 1909, l’Ecole française de Rome et le Service
Archéologique de Tunisie dirigé par A. Merlin leurs confièrent la
mission de se rendre à Haïdra et d’effectuer les premières
fouilles officielles. Le rapport et les résultats de leurs travaux
furent publiés en 1912 dans la revue de l’Ecole française de
Rome, les Mélanges
de l’École Française.
Leur article se divisait en deux grands chapitres. Le premier
concernait la partie archéologique des travaux et le deuxième
traité la question épigraphique.
La
première année de fouilles en 1908, A. Piganiol se chargea
principalement des inscriptions en effectuant des fouilles des
nécropoles Est, Sud, et Ouest. Il prospecta aussi dans les zones
nord-ouest de la voie Carthago-Theveste, la partie est de la
cité au sud de la route moderne et sans approfondir la Basilique I,
ainsi que la «maison fortifiée». Par ailleurs, L’épigraphiste
étendit ses recherches dans le territoire proche de la cité,
notamment vers le nord, l’est et le nord-est. La deuxième année,
les fouilles se concentrèrent principalement sur certains édifices:
les thermes, la «basilique civile» (le monument à fenêtres), et
le site d’Henchir el Khima au nord-est d’Haïdra [deux sites hors
d’Haïdra, concernant Tébessa]
Grâce
aux deux chercheurs, les fouilles entreprises ont permis une avancée
importante sur la connaissance du site. A. Piganiol par ses
recherches réussit à identifier deux types de nécropoles prés de
l’arc de Septime Sévère, l’une militaire situé la plus à
l’est le long de la voie romaine, l’autre civile placé entre
l’arc et le cimetière militaire et identifier les autres
nécropoles du site.
Par ailleurs, de nombreux mobiliers2 ont été découverts et attribués à chacun des secteurs. La description de la fouille des thermes fut plutôt courte, car les archéologues pensaient avoir à faire à une nouvelle église. En revanche, la basilique I est décrite avec beaucoup de détails et proposent une restitution du plan de l’édifice et son élévation. Enfin, les deux archéologues ne se contentèrent pas d’explorer uniquement Ammaedara, mais élargirent leurs recherches au nord de la cité, à l’est en direction de Thala, au sud-est vers les djebels et au sud dans la plaine de Foussana. Ils purent se rendre aussi sur les multiples ruines qu’avaient répertoriées les brigades topographiques. Ainsi ils eurent une formidable récolte d’inscriptions épigraphiques. A. Piganiol et Laurent-Vibert rapportèrent plus de cent-soixante-dix nouvelles inscriptions, dont vingt-neuf issues d’Henchir el-Khima, quatre-vingts d’Haïdra (trente venant du cimetière orientale (en 1929, est retrouvée par M. Coggia et Héron Villfosse sur la route de Haïdra près de la frontière un bas relief, BCTH, 1909).
Par ailleurs, de nombreux mobiliers2 ont été découverts et attribués à chacun des secteurs. La description de la fouille des thermes fut plutôt courte, car les archéologues pensaient avoir à faire à une nouvelle église. En revanche, la basilique I est décrite avec beaucoup de détails et proposent une restitution du plan de l’édifice et son élévation. Enfin, les deux archéologues ne se contentèrent pas d’explorer uniquement Ammaedara, mais élargirent leurs recherches au nord de la cité, à l’est en direction de Thala, au sud-est vers les djebels et au sud dans la plaine de Foussana. Ils purent se rendre aussi sur les multiples ruines qu’avaient répertoriées les brigades topographiques. Ainsi ils eurent une formidable récolte d’inscriptions épigraphiques. A. Piganiol et Laurent-Vibert rapportèrent plus de cent-soixante-dix nouvelles inscriptions, dont vingt-neuf issues d’Henchir el-Khima, quatre-vingts d’Haïdra (trente venant du cimetière orientale (en 1929, est retrouvée par M. Coggia et Héron Villfosse sur la route de Haïdra près de la frontière un bas relief, BCTH, 1909).
En
1916, l’article sur la Troisième Légion Auguste de De Pachtère
Felix-George3,
membre de l’Ecole française de Rome (1907-1910), démontre
qu’Ammaedara
était le premier quartier général de la légion avant son
installation à Theveste,
il est lu par R. Cagnat le 16 juin 1916 devant les membres de
l’Académie des Inscriptions des Belles-lettres. Il est probable
que F.-G. De Pachtère rendit visite à Haïdra probablement pendant
son voyage en Tunisie entre mai et juin 1910 où il fit des
prospections dans la région de Téboursouk et du Fahs.
Quelques
mois avant la Grande guerre, en mai 1914, Martin Jean (1888-1914),
membre de l’Ecole de 1912 à 1914 est envoyé par l’Ecole
française de Rome et le Service des antiquités de Tunisie à
Henchir Bouibet. Sa principale mission était de récolter des textes
qu’il trouva dans deux groupes de ruines l’un composé d’une
nécropole et l’autre de plusieurs bâtiments. Il décrivit les
monuments dont vingt-quatre nouvelles inscriptions et révisa
certaines qui avaient été recopiées par G. Wilmanns. Puis, pendant
toute la durée de la guerre aucune nouvelle documentation sur
Ammaedara,
sauf en août 1918, une épitaphe chrétienne est recopiée par M.
Pernot, inspecteur de l’Enregistrement à Thala qu’il adresse au
musée Lavigerie à Carthage. en 19204,
reprise de la campagne de prospection des brigades topographiques
interrompues au cours de la guerre.
Au
début des années vingt Enrico Josi archéologue du Pontificio
Istututo di archeologia cristina de Rome passa Par Haïdra pour
ses recherches sur les églises chrétiennes du Maghreb, il y
photographia les basiliques I et II, la citadelle, le monument à
Auges et l’arc. Ses photos plus celles du Service des Antiquités
de Tunisie et un certains nombres de clichés de l’American
Academy in Rome sont les seuls photographies conservées avant
l’intervention du docteur Dolcemascolo qui transforma l’ensemble
du paysage archéologique du site.
Au
début des années vingt (1925) la première mission archéologique
est organisé par le docteur Dolcemascolo médecin à la mine de
phosphate de Kalaat Djerda (aujourd’hui KalaaT Kasbah) sous l’égide
de Louis Poinssot directeur des SAAT. Dolcemascolo aura la charge du
chantier jusqu’aux débuts de la Seconde guerre mondiale. Bien que
la mission se déroule sous la période du protectorat français,
elle préfigure les futures missions qui s’effectueront après la
décolonisation. Dolcemascolo se chargea au cours des travaux de
déblayer la basilique I de Melleus ou de saint Cyprien, lors du
nettoyage la mission on retrouva (1934-1935) un dépôt de reliques
déposés par l’évêque Melleus,
correspondant à ceux de saint-Cyprien (voir le plan du site), il
dégagea aussi le capitole et une partie des thermes d’hiver,
entreprit le premier la fouille de la basilique II dite de Candidus
ou des Martyrs qui permit de découvrir l’inscription des martyrs
de Dioclétien. Malheureusement, les fouilles sur le chantier se
firent sans véritable contrôle méthodologique, Louis Poinssot
supervisait les travaux de Tunis, ainsi aucun inventaire ne fut fait
pour répertorier l’ensemble des objets trouvés. Cependant, nous
savons que quelques pièces furent ramenées chez lui, dont trois
inscriptions, des objets comme des reliquaires, et des chapiteaux. A
sa mort les pièces rejoignirent le musée du Bardo et Les recherches
s’interrompirent au début de la Seconde guerre mondiale. Il faut
attendre les années soixante et la décolonisation pour que commence
une nouvelle campagne archéologique.
Les
fouilles à Ammaedara
reprennent en septembre-octobre 1967, elles sont organisées par
l’Institut National d’Archéologie Tunisien, en collaboration
avec le Centre National de la Recherche Scientifique (Centre de
recherches sur l’Afrique méditerranéenne à Aix-en-Provence) .
Cette première mission était co-dirigée par Hedi Slim, Abdelmajid
Ennabli et Noel Duval. Ce dernier entre 1963 et 1966 alors qu’il
effectue des recherches sur le site de Sbeitla, prit des relevées à
Ammaedara
principalement sur la basilique I de Melleus
ou de saint- Cyprien, à la fois sur les fondations et sur les
inscriptions en prévision des fouilles pour l’année 19675.
Cette première mission inaugure 45 ans de collaboration scientifique
franco-tunisienne, de recherches archéologiques à Ammaedara,
ainsi que l’étude des inscriptions épigraphiques du site,
notamment les inscriptions chrétiennes qui «représentent
l'un des groupes les plus importants et les plus homogènes de
l'Afrique du Nord, après celui de Carthage»6.
Aujourd’hui
les dernières recherches7
co-dirigées par Fathi Béjaoui (ancien directeur de INP8,
et actuellement responsable du site d’Ammaedara),
Ben
Abdallah Benzina Zeineb responsable de l’étude des inscriptions
païennes d’Ammaedara
et
François Baratte de l’INAH (l’Institut National d’Art et
d’Histoire), se
sont surtout concentrées sur la citadelle byzantine, les deux
églises à l’intérieure et le bâtiment à Auges situé au
nord-est de la cité près de la «chapelle vandale».
1Duval
Noel, «Topographie et urbanise d’Ammaedara (actuellement
Haïdra)», dans ANRW,
II, 10-2, 1982, p. 643.
2Un
mobilier qui se compose de 29 lampes, 23 amphores ou vases en terre
cuite, un bracelet et une fibule certains se retrouvent dans le
catalogue du musée Alaoui 1910 et d’autre peuvent être consulté
dans l’article de Piganiol & Laurent-Vibert: Piganiol André,
Laurent-Vibert Robert. «Recherches archéologiques à Ammaedara
(Haïdra)», in Mélanges
d'archéologie et d'histoire
T. 32, 1912, p.
69-229, fig. 1.
3
De Pachtère Félix-Georges, «Les camps de la troisième légion en
Afrique au premier siècle de l'empire», in Comptes-rendus
des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,
60e année, N. 3, 1916, p.
273-284.
4
Pour Haïdra les travaux débutes en 1921 jusqu’en 1927-1928.
Voici la liste des brigades qui couvrirent la région et à quelle
période elles agirent:
N°LIX,
feuille de Kalaat-Senane, brigade du capitaine Roger (1921). Pour
Haïdra, Lt. Maugenest (travaux 1-1 et 1-2); Briaud (2-1 et 2-2);
Chosson (3-1 et 3-2); s/Lt. Boulard (4-2 et 5-1); cpt. Debled (4-1
et 5-2); Désiré (6-1 et 6-2).
N°LXVII,
feuillet de Thala, 1er
brigade du cpt. Baudry.
N°LXXV,
feuille de djebel Bireno, cpt. Houdemont ( 1927-1928).
N°CLXVIII,
feuille algérienne de Morsott (couvre une partie du territoire
antique d’Ammaedara).
5
Duval Noël, «L'église de l'évêque Melleus à Haïdra (Tunisie)
: la campagne franco-tunisienne de 1967», in: Comptes-rendus
des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,
112e année, N. 2, 1968, p.221-228.
6
Duval Noël, Recherches
archéologiques à Haïdra. I. Les inscriptions chrétiennes,
Rome, École Française de Rome, 1975, p.5.
7La
dernière mission a eu lieu en septembre 2012.
8Institut
National du Patrimoine, anciennement l’Institut National
d’Archéologie et d’Art Tunisien (INAAT).
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